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Kobi Libii, scénariste et réalisateur de « The American Society of Magical Negroes », réinvente les vieux clichés par la magie

L’American Society of Magical Negroes propose une idée provocatrice : et si les Noirs avaient la possibilité de se joindre à une ligue secrète leur conférant le pouvoir d’effacer l’inconfort de n’importe quel Blanc ? Le film relève que le racisme découle des angoisses blanches. Si ces dernières pouvaient être apaisées, les personnes noires pourraient être moins exposées à des risques. La vision satirique du réalisateur Kobi Libii sur la dynamique raciale représente un changement audacieux, d’autant plus audacieux qu’il s’agit d’un réalisateur encore peu expérimenté.

Le personnage principal, Aren, est interprété par le juge Smith. Aren est un artiste de 27 ans vivant à Los Angeles, courtois mais qui manque de confiance en soi. Il crée des sculptures en fil sans trouver le courage nécessaire pour expliquer leur signification à d’éventuels acheteurs. Tout change lorsqu’un barman (David Alan Grier) le présente à la ligue éponyme suite à une méprise raciste d’un de ses clients à la galerie.

Les nouveaux pouvoirs d’Aren lui donnent à la fois une estime de soi et une meilleure compréhension du monde, des atouts utiles lorsqu’il accepte un emploi chez une entreprise de médias sociaux qui bafoue ses idéaux inclusifs.

Le film de Libii déconstruit le trope du « Magical Negro », où les personnages noirs ne sont présents que pour soutenir l’histoire d’un protagoniste blanc, parfois de manière fantastique. On retrouve ce cliché dans de nombreux films hollywoodiens, comme Sidney Poitier dans Les Lys des champs, Cuba Gooding Jr. dans Au-delà de nos rêves, Michael Clarke Duncan dans La Ligne verte, Will Smith dans La Légende de Bagger Vance et Mahershala Ali dans Green Book.

Dans cette interview, Libii, que l’on connaît surtout pour ses rôles dans Madam Secretary et Transparent, partage ses connaissances sur l’American Society of Magical Negroes, le racisme aux États-Unis et ses réflexions autour de l’idée centrale qui a guidé son travail sur ce film.

Au-delà du trope évoqué dans le titre de son film, Kobi Libii indique que celui-ci explore un mécanisme de défense bien spécifique. En tant qu’homme noir, il a été éduqué sur la façon de survivre en Amérique, notamment sur la nécessité d’être conciliant avec les Blancs dans certaines situations pour rester en sécurité. Le film raconte l’histoire d’une personne qui essaie de désapprendre ce comportement, tout en utilisant l’aspect fantastique.

Le film jette également un regard critique sur les dynamiques raciales aux États-Unis. Selon Libii, il existe une véritable mythologie américaine autour de la grandeur et de la perfection de la nation, ce qui rend difficile la prise en compte des péchés de cette dernière. Les blancs ont l’idée dominante que l’Amérique est le plus grand pays du monde, ce qui peut mener à des ruptures dans le dialogue.

Le personnage d’Aren, artiste, sert de véhicule à une confiance subjective. Une grande partie de son parcours consiste à apprendre à prendre plus de place dans le monde. En termes de confiance en soi et de valeur, l’art d’Aren est le miroir parfait de cette qualité. En effet, la valeur de ses sculptures en fil n’est pas objective, c’est à lui de nous la démontrer.

Par ailleurs, le film interroge sur l’existence d’une version possible de cette société secrète dans d’autres pays. Toutefois, pour le réalisateur, il y a certaines qualités qui sont typiquement américaines.

Enfin, il présente la parodie de la culture de travail des entreprises de médias sociaux. Celles-ci prétendent souvent promouvoir l’inclusion, mais en réalité, elles ne font que jouer un rôle.

(Photo en vedette : de gauche à droite, le juge Smith dans le rôle d’Aren, David Alan Grier dans le rôle de Roger et Aisha Hinds dans le rôle de Gabbard dans THE AMERICAN SOCIETY OF MAGICAL NEGROES de Kobi Libii. Crédit : Tobin Yelland / Focus Features)

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